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Question de M. Pierre Jean Rochette (Loire - Les Indépendants) publiée le 28/03/2024

M. Pierre Jean Rochette interroge M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer sur l'équivalence entre permis C et permis D, comme solution pour remédier à la pénurie de conducteurs de cars scolaires.

En septembre 2023, la fédération nationale des transports de voyageurs (FNTV) recensait 6 000 postes de cars scolaires non pourvus. Si ce chiffre est en légère amélioration par rapport à l'année précédente, grâce aux efforts du secteur en termes de formation, on ne peut s'en satisfaire, d'autant que cette carence ne concerne quasi-exclusivement que les territoires périurbains et ruraux, accentuant encore davantage les inégalités avec les centres-villes. La pénurie de conducteurs de cars scolaires pose aussi un problème en matière de sécurité. Avec la modification et l'optimisation des circuits de ramassage scolaire, certains élèves doivent en effet parcourir de plus grandes distances, souvent seuls, pour se rendre à un point d'arrêt.

Une solution permettant de remédier, au moins partiellement, à ces difficultés de recrutement serait de simplifier l'obtention par les personnes déjà détentrices d'un permis poids lourds (permis C, C1 et C1E) du permis nécessaire pour conduire des véhicules affectés au transport de personnes (permis D, D1 et D1E).

Si la marge de manoeuvre du législateur français est en la matière limitée, avec un cadre européen des conditions de délivrance des permis de conduire strict et une transposition au niveau national relevant majoritairement du domaine réglementaire, elle n'est cependant pas inexistante.

L'article L. 221-1 du code de la route prévoit en effet ce qui peut s'apparenter à un système d'équivalence, en permettant à certains conducteurs de conduire des véhicules agricoles sans être titulaires du permis correspondant.

Il l'interroge donc sur la possibilité d'adapter la réglementation en matière de délivrance de permis pour les véhicules affectés au transport de personnes, en créant une équivalence destinée aux détenteurs de permis poids lourds à l'instar de ce qui existe pour les véhicules agricoles. Cela pourrait notamment passer par la création d'une équivalence à conduire un petit véhicule de 22 places pour les titulaires des permis PL C EC.

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Réponse du Secrétariat d'État auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé de la ville, et auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer, chargé de la citoyenneté publiée le 10/04/2024

Réponse apportée en séance publique le 09/04/2024

M. le président. La parole est à M. Pierre Jean Rochette, auteur de la question n° 1182, adressée à M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer.

M. Pierre Jean Rochette. Ma question porte sur un sujet qui concerne à la fois le pouvoir d'achat, le monde agricole, la ruralité et la mobilité. C'est vous dire combien elle est importante.

En zone rurale, nous déplorons une pénurie importante de conducteurs d'autocars pour les transports scolaires. La Fédération nationale des transports de voyageurs (FNTV) déplorait un manque de 6 000 conducteurs à la rentrée de septembre 2023.

Les raisons en sont diverses, mais on peut citer parmi celles-ci la fin du service militaire, qui jouait un rôle de centre de formation important pour les conducteurs de poids lourds et d'autocars, ou la complexité croissante des formations.

De fait, ce métier est victime d'un désamour, qui pose de sérieux problèmes aux collectivités pour assurer, sur le terrain, le service public que nous devons à nos concitoyens.

Madame la secrétaire d'État, ma question est simple : pourquoi ne pas autoriser une équivalence entre les permis ? Est-il normal que le chauffeur d'un poids lourd de 44 tonnes ne puisse pas conduire un minibus transportant quinze enfants ? S'il dispose des compétences pour conduire un semi-remorque, il me semble qu'il doit logiquement pouvoir conduire un minibus. Cette pratique était permise autrefois, avant qu'elle ne cesse, en application, je suppose, de la réglementation européenne.

Pourtant, la dérogation prévue à l'article L. 221-1 du code de la route crée un système d'équivalences sous conditions. Nous pourrions ainsi envisager une nouvelle classification des minicars, ce qui permettrait de régler un véritable problème en zone rurale. Madame la secrétaire d'État, comptez-vous aller dans ce sens ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Sabrina Agresti-Roubache, secrétaire d'État auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée de la ville, et auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer, chargée de la citoyenneté. Monsieur le sénateur, la pénurie de conducteurs de cars scolaires est, vous le savez, un sujet de préoccupation pour le Gouvernement.

Si la situation a été difficile, voire très difficile lors de la rentrée scolaire 2022, elle s'est nettement améliorée à la rentrée de septembre 2023. Elle demeure néanmoins fragile, dans un contexte marqué par les tensions de recrutement dans le secteur du transport de voyageurs. Ces difficultés résultent de facteurs multiples comme l'augmentation régulière des besoins, une pyramide des âges très défavorable et des niveaux de rémunération et des perspectives d'évolution professionnelle peu attrayants.

J'en viens plus particulièrement à votre proposition. La catégorie D du permis de conduire concerne les véhicules automobiles construits pour transporter plus de huit passagers, non compris le conducteur.

Cette réglementation, rappelée dans le code de la route, découle de la transposition en droit français de la directive 2006/126/CE du Parlement européen et du Conseil du 20 décembre 2006 relative au permis de conduire, laquelle s'impose à l'ensemble des États membres.

Cette directive prévoit des équivalences entre les différentes catégories, mais il n'en existe aucune entre les catégories de transport de marchandises et celles qui touchent au transport de personnes.

En effet, le transport de voyageurs requiert des compétences différentes de celles qui sont nécessaires pour le transport routier de marchandises, comme la capacité à prendre en compte la sécurité des passagers.

Par ailleurs, le système d'équivalences que vous citez, qui est défini à l'article L. 221-1 du code de la route et qui permet à certaines personnes de conduire des véhicules agricoles sans être titulaires du permis correspondant, tient au fait que les véhicules agricoles sont hors du champ de la directive. Il n'est donc pas applicable aux véhicules de catégorie D.

M. le président. La parole est à M. Pierre Jean Rochette, pour la réplique.

M. Pierre Jean Rochette. C'est bien dommage, car cette mesure constituerait un levier en faveur du pouvoir d'achat des agriculteurs. Bien souvent, ces derniers assuraient le transport scolaire dans nos zones rurales, une activité qui pouvait leur rapporter jusqu'à 1 000 euros de plus par mois, selon le volume horaire du travail réalisé.

J'invite le Gouvernement à réfléchir à ma proposition : il s'agit simplement d'étendre la dérogation prévue à l'article L. 221-1 du code de la route au transport de voyageurs. Un conducteur de poids lourds est parfaitement capable de conduire un minicar de type Renault Master sans pour autant avoir suivi une formation spécifique.

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